[POLITIQUE] L’Assemblée nationale rejette la loi agricole Duplomb pour accélérer son adoption

Les députés favorables à la proposition de loi ont voté une motion de rejet stratégique afin de contourner des milliers d’amendements. Le texte, controversé notamment pour la réintroduction de certains pesticides, est désormais entre les mains d’une commission mixte paritaire.

Modifié : 27 mai 2025 à 10h37 par César Chahat-Franco

la FNSEA stationne une dizaine de tracteurs devant l'Assemblée nationale, à Paris.
la FNSEA stationne une dizaine de tracteurs devant l'Assemblée nationale, à Paris.
Crédit : TELMO PINTO / NURPHOTO / AFP

Lundi 26 mai, l’Assemblée nationale a voté le rejet de la proposition de loi agricole dite Duplomb, pourtant soutenue par une majorité de députés de droite et du bloc présidentiel. Une manœuvre parlementaire inhabituelle, portée par le rapporteur du texte, Julien Dive (LR), pour éviter l’examen de milliers d’amendements jugés obstruants, principalement déposés par les groupes écologiste et insoumis. 

 

Une tactique pour court-circuiter l’opposition 

En adoptant cette motion de rejet préalable, les députés favorables au texte ont choisi de passer directement à l’étape de la commission mixte paritaire (CMP). Celle-ci réunira sept députés et sept sénateurs chargés d’élaborer une version commune du texte, en s’appuyant sur celle déjà votée au Sénat. L’objectif : éviter les modifications en séance publique et verrouiller le contenu du texte avant son retour final devant les deux chambres. 

 

Des mesures contestées, des tensions accrues 

La proposition de loi prévoit notamment de réintroduire certains néonicotinoïdes à titre dérogatoire, interdits en France depuis 2018 pour leur nocivité sur les pollinisateurs. Elle facilite également le stockage de l’eau pour l’irrigation, au cœur des tensions environnementales. Ces dispositions ont suscité de vives oppositions dans les rangs de la gauche et chez les ONG écologistes, qui dénoncent un recul environnemental majeur. 

Greenpeace France a fustigé dans un communiqué un « coup de force anti-démocratique et anti-écologique », tandis que les députés de la France insoumise ont évoqué un « 49.3 déguisé » et menacent de déposer une motion de censure contre le gouvernement de François Bayrou. 

 

Vers une adoption express et verrouillée ? 

Si la commission mixte paritaire parvient à un accord, le texte reviendra ensuite devant l’Assemblée et le Sénat pour un vote sans possibilité d’amendement. Un processus que le gouvernement et ses alliés souhaitent rapide, afin de répondre aux promesses faites aux agriculteurs en début d’année face à leur mobilisation. 

Cette séquence parlementaire tendue illustre les fractures profondes entre impératifs agricoles et exigences écologiques, dans un contexte de remise en question croissante du modèle productiviste français.