[ SANTE ] À Istres, l'unité face au désert médical

La communauté professionnelle territoriale de santé Ouest étang de Berre a déposé son projet global pour 5 ans, et espère pouvoir commencer ses actions à la rentrée

12 juin 2023 à 12h35 par La provence Rios

[ SANTE ] À Istres, l'unité face au désert médical
Crédit : S.G

Jusqu'à présent, on était en gestation, maintenant c'est l'accouchement !" se réjouit le docteur Aurélie Guindon Picard, présidente de la communauté professionnelle territoriale de santé (CPTS) Ouest de l'étang de Berre. La structure - qui regroupe 150 professionnels et organismes de santé des communes d'Istres, Fos et de Port-Saint-Louis désireux de coordonner leur action - a été créée en août 2021. Elle a enfin déposé son projet global de santé pour les cinq prochaines années auprès de l'agence régionale de santé (ARS) et de la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM). Une fois que ces institutions l'auront validé, après une phase de négociations, elles pourront financer ses actions. Dès la rentrée, espèrent les soignants.

En attendant le feu vert officiel, ce projet a été présenté aux membres de la structure réunis mardi dernier à la clinique d'Istres. "Les actions ont été construites sur les problèmes de notre territoire, sur toutes les difficultés qu'on rencontre nous tous, rappelle le docteur Aurélie Guindon Picard. Le but c'est d'essayer de faire en sorte qu'on puisse travailler le mieux possible tous ensemble, pour notre confort et pour le bien-être des patients." Mais aussi d'exposer à l'ARS la réalité locale : "Ils ne sont pas forcément à même de voir à quel point il y a une pénurie de médecins traitants, expose Tiffany Portes, coordinatrice de la CPTS. Notre objectif a été de mettre en évidence le fait que la situation est encore pire que ce qu'ils pensent". Et la présidente de rebondir : "Ils ont des chiffres qui ont 4 ans. On leur a expliqué qu'on n'était plus que 33 médecins sur le territoire, ils sont un peu tombés des nues. Ils nous croyaient 45."

17 000 patients sans médecin traitant

La première action que le projet global de la CPTS vise à mettre en place, "sans doute la plus compliquée et celle sur laquelle on nous attend le plus" pointe Tiffany Portes, consiste donc à faciliter l'accès aux médecins traitants, pour éviter au maximum les renoncements aux soins. "17 000 patients n'en ont pas, fait remarquer la présidente. On est dans un désert médical, on sait qu'on n'est pas nombreux. Il y a des patients qui ont des pathologies lourdes et qui auraient besoin d'une prise en charge globale, c'est plus vers ceux-là qu'on va se focaliser."

La prise en charge des soins non programmés constitue un deuxième grand défi. "C'est un des gros soucis qu'on a tous, reconnaît là aussi la présidente. Quand les patients ont besoin d'un rendez-vous urgent avec des médecins généralistes, on a du mal à leur répondre avant une semaine. Il faut attendre aussi plus de trois heures pour les centres 7 sur 7... Il faut qu'on trouve des solutions pour être le plus efficaces possible."

À cet enjeu, le gouvernement souhaite répondre en mettant en place un nouveau dispositif, le service d'accès aux soins (SAS), une sorte de nouveau numéro 15, pour "urgences moins urgentes", orientant les patients vers des médecins du territoire, qui doivent chacun fournir 2 h hebdomadaires à ce service. Le manque de pratiquants rend cependant sa mise en place plutôt délicate sur le secteur.

Amélioration des parcours de soins

Le manque de médecins est une caractéristique du territoire : certaines pathologies aussi. La CPTS met donc l'accent sur les parcours de soins des patients atteints de diabète et de cancers du pancréas et du poumon, "qui ont très certainement un lien avec l'environnement local, on ne va pas se le cacher", glisse Tiffany Portes. L'objectif est ici d'améliorer les repérages précoces et la prise en charge des patients, tout en se rattachant aux actions déjà mises en place dans les environs. Le docteur Aurélie Guindon Picard illustre : "Sur Martigues, ils sont en train de faire tout un projet sur le soin post-cancer, et l'IPC fait un vaste projet de dépistage du cancer avec les professionnels de ville. On va essayer de se greffer à leurs projets." Les dépistages, la CPTS veut aussi les renforcer pour les cancers du sein, du col de l'utérus, tout en développant les actions de prévention contre le tabagisme, pour la sensibilisation à la vaccination contre le papillomavirus...

Un plan de bataille ambitieux : il n'en fallait pas moins pour les trois communes de la CPTS : "L'ARS est très à l'écoute de notre territoire, relève la présidente. On est un point noir des Bouches-du-Rhône. Istres est la deuxième ville du département en termes de manque de médecins."

Un week-end pour de nouveaux médecins ?

Le grand problème de la CPTS, c'est le manque de médecins : ils sont 33 pour 67 000 habitants. "On sait que chez les médecins généralistes, ceux qui s'installent sont ceux qui ont fait des stages sur place. Mais on a aussi un grand projet : organiser un week-end séduction !" C'est une annonce du docteur Aurélie Guindon Picard, et l'une des actions imaginées dans le cadre du plan global. Plus précisément ? Il s'agirait, "comme ils l'ont fait en Sologne", d'organiser une sorte de salon où seraient représentées les professions de santé, mais aussi tous les à-côtés nécessaires à une vie locale épanouie, propices à attirer de jeunes couples : les services publics présents sur place, les associations sportives, l'offre culturelle, les crèches... et montrer qu'ici aussi, on vit !