[ SANTE - MARSEILLE ] Coronavirus : fin de l'épidémie ? Raoult dégaine encore.

17 avril 2020 à 7h37 par Patrick MONROE

RADIO CAMARGUE

Il y a les chiffres. L’interprétation que l’on en fait. L’impact que cette même interprétation a dans l’opinion et le comportement de la population.
Nouvel exemple de distorsion cognitive dans cet exercice à trois bandes après la mise en ligne mardi d’une nouvelle vidéo du Pr Didier Raoult. "Pour nous, l’épidémie est en train de disparaître progressivement, explique-t-il. On avait jusqu’à 368 cas nouveaux par jour et là, nous sommes plutôt dans la zone de 60-80 par jour. Il y a une diminution très significative du nombre de cas détectés, encore plus chez les asymptomatiques. Il est possible que l’épidémie disparaisse au printemps et que d’ici quelques semaines, il n’y ait plus de cas, pour des raisons qui sont extrêmement étranges mais qu’on a l’habitude de voir pour la plupart des maladies virales respiratoires".

Conclusion ? Didier Raoult a sauvé Marseille de la pandémie, si on résume ses supporters sur les réseaux sociaux. Bien sûr que non. Lui-même ne le dit pas. À Marseille, comme ailleurs en France, on constate une baisse de la progression de l’épidémie - des nouveaux cas mais en moins grand nombre, et une baisse sensible du nombre de patients en réanimation.

Quand il parle de "raisons étranges", Didier Raoult évoque en fait des observations sur les épidémies de maladies respiratoires qui effectivement, comme la grippe, déclinent lors d’un changement de saison mais qui, à ce jour, ne sont pas complètement expliquées scientifiquement. Car elles sont plurifactorielles : une plus grande promiscuité en hiver entre les différents sujets contacts, la fragilisation de la muqueuse, lieu par excellence de l’infection, qui réchauffe l’air froid que l’on respire, la moindre exposition aux rayons ultraviolets, qui ont une action virucide… Le Covid-19 va-t-il disparaître avec le printemps ? À ce jour, on peut l’imaginer. Pas l’assurer.

"Cela va encore prendre des semaines" (Philippe de Mester)

Quel est l’impact du confinement dans ces chiffres ? Didier Raoult n’en pipe mot dans sa vidéo. Il a, à plusieurs reprises, critiqué la stratégie de confinement, estimant qu’elle était surdimensionnée, lui opposant un dépistage massif pour isoler les patients positifs au Covid-19. Faute de dépistage massif, même si Marseille est mieux doté que le reste de la France, "on ne sait pas quel est l’impact réel du confinement" sur ces résultats, reconnaît-on à l’IHU.
"Il serait malvenu de critiquer un confrère de l’AP-HM. Ce qui est indiscutable, c’est que le nombre de nouveaux cas diminue dans les hôpitaux de Marseille, de Paca, et partout en France, et que cela est la conséquence du confinement, affirme, pour sa part, le Pr Pascal Auquier, épidémiologiste chargé de réaliser les modélisations de l’épidémie pour l’AP-HM. S’agissant d’un coronavirus, on peut espérer aussi un effet de saisonnalité de la maladie, mais il est trop tôt pour l’affirmer. Le fait que l’été, les gens vivent davantage dehors peut également jouer sur la contagiosité. Mais si cette saisonnalité existe, cela peut signifier aussi qu’il y aurait inversement un regain de l’épidémie à l’automne ou à l’hiver prochain. Donc, dire que l’épidémie est finie est pour le moins osé".
C’est avec grande crainte que l’annonce d’une fin de l’épidémie à Marseille a été reçue par les autorités de santé. Philippe de Mester s’est donc fendu d’une vidéo, le ton grave, pour freiner les optimistes.

"Non, l’épidémie de coronavirus n’est pas en train de disparaître. Dans notre région, pour la journée d’hier (mardi 14 avril), 481 nouveaux cas ont été enregistrés, 1847 personnes sont à l’hôpital et 433 dans un service de réanimation dans une situation préoccupante. Rien que dans la journée d’hier, 11 personnes sont décédées de cette maladie. Alors non, l’épidémie, n’est pas en train de disparaître, tance-t-il. Les choses vont un peu mieux, le nombre de personnes qui entrent à l’hôpital est moins important que ceux qui en sortent, le nombre de personne qui entrent en réanimation est un petit peu moins important que ceux qui en sortent". Et d’encourager à poursuivre les efforts de civisme.

[source / La Provence]