La décision date du 29 avril, Gaby Charroux, maire communiste de Martigues, a bien été mis en examen pour "favoritisme" dans le cadre de l’enquête sur l’affaire Semivim. Cette mise en examen, confirmée à France 3 Provence-Alpes par le parquet de Marseille, s’ajoute à une longue liste : onze personnes ont déjà été inquiétées dans ce dossier tentaculaire, qui mêle affaire de drogue, favoritisme politique et soupçons de corruption dans le secteur du logement social.
Tout commence en février 2020, lorsqu’un cargo de la CMA-CGM est intercepté par les autorités américaines et italiennes avec à son bord plus de 3,3 tonnes de cocaïne cachées dans une cargaison de bananes. C’est le point de départ d’une enquête qui mènera les enquêteurs jusqu’à une villa de Saint-Mitre-les-Remparts, tout près de Martigues, où les ramifications locales d’un trafic international de drogue croisent celles d’un vaste système de détournement de marchés publics.
En 2021, une information judiciaire est ouverte à Marseille pour une série d’infractions graves : corruption active et passive, trafic d'influence, prise illégale d’intérêts, blanchiment en bande organisée… Tous les soupçons se concentrent alors sur la Semivim, la société d’économie mixte chargée de la gestion de près de 3 000 logements sociaux à Martigues. Blast, le média d’investigation, avait été le premier à révéler les dysfonctionnements profonds au sein de cette structure.
Parmi les personnes poursuivies figurent l’ancienne directrice de la Semivim, Corinne Dupont, également ex-directrice de cabinet du maire, et son compagnon Medhi Khouani. Tous deux ont été mis en examen en avril 2022 pour "favoritisme". Deux adjoints au maire, membres du conseil d’administration de la Semivim, sont également mis en cause. Selon plusieurs témoignages recueillis par Blast, des salariés auraient alerté à de nombreuses reprises la mairie sur les dérives internes de la société, en vain.
Trois entreprises du BTP, filiales du groupe Omnium développement, sont elles aussi mises en examen en mai 2022. Leurs dirigeants sont accusés de corruption active et de recel. Placés sous contrôle judiciaire, ils ont dû s’acquitter de lourds cautionnements, et, en janvier 2024, leurs sociétés ont été condamnées à une amende d’intérêt public de 1,7 million d’euros. Elles ont également dû indemniser la Ville de Martigues et la Semivim à hauteur de 250 000 euros.
Reste à savoir quel rôle a pu jouer Gaby Charroux, président de la Semivim jusqu’en 2023.
Il estime que cette procédure a été menée "à charge et à décharge" et qu’elle a permis de lever "bien des contre-vérités". Pourtant, au fil de l’enquête, les révélations sur les pratiques de la Semivim ont soulevé de nombreuses questions sur la gouvernance municipale et le contrôle exercé – ou non – par ses responsables politiques.
Le dossier Semivim, né d’un conteneur rempli de cocaïne, continue de faire tomber des têtes dans les milieux politique et économique du pourtour de l’étang de Berre. Et l’histoire, manifestement, est encore loin d’être terminée.