[ SOCIETE - ARLES ] L'heure de vérité pour le contournement autoroutier d'Arles ?

Alors que le ministère des transports a prévu d'annoncer l'abandon de projets cette semaine, la Ville parachève son programme de requalification de la RN 113 pour emporter l'adhésion de l'État.

8 janvier 2024 à 15h55 par Laurent Rugiero /laprovence.com

[ SOCIETE - ARLES ] L'heure de vérité pour le contournement autoroutier d'Arles ?

C'est un flou persistant dans la communication gouvernementale qui a incité le Collectif 2028, qui milite pour le contournement autoroutier d'Arles, à adresser un courrier à Clément Beaune la semaine dernière. Intitulée "L'Arlésienne", la lettre reproche notamment au ministre des Transports, qui connaît très bien le dossier (notamment parce qu'il a des attaches familiales à Fontvieille, Ndlr) d'avoir qualifié le projet de "lointain" au micro de France Bleu Provence, le 1er décembre. "Ce n'est pas pour tout de suite", a prolongé Clément Beaune en indiquant que "le projet n'est pas ficelé".

Un discours qui a de quoi émouvoir les pro-autoroute, pour qui "cela fait plus de 30 ans que le projet est quasi-défini, chiffré et que les décideurs en repoussent le lancement sans vraiment d'explication convaincante". "Chaque fois que les ministres prennent la parole, on est un peu inquiet", confirme Odile Crombé, porte-parole d'un collectif rassemblant notamment plusieurs comités d'intérêt de quartiers et de villages.

L'inquiétude a pris de l'épaisseur quand, mercredi dernier, à la faveur d'un entretien dans Le Parisien, le même Clément Beaune a déclaré qu'il annoncerait cette semaine "des mesures inédites d'abandon de projets autoroutiers". Une menace que l'éventuelle éviction du ministre à l'occasion du remaniement claironné depuis plusieurs jours (il pourrait faire les frais de ses prises de position sur la loi immigration, Ndlr) n'allège pas. "On n'a pas attendu ce psychodrame pour agir", assène Odile Crombé, qui voit dans les hésitations gouvernementales la trace laissée par les mobilisations d'écologistes l'année dernière sur le tracé de l'A 69, entre Castres et Toulouse : "On est dans une marmite et ça bouillonne, c'est celui qui parle le plus fort qui a raison."

Une consultation en cours

"La conscience collective est en train d'évoluer", constate en écho, tout en s'en félicitant, Jean-Luc Moya, dans le camp d'en face, celui des opposants farouches à un "projet archaïque, inutile et écocide", réunis dans "un collectif non formalisé" dans lequel on retrouve diverses associations écologistes (Nacicca, Agir pour la Crau, France Nature Environnement, Les Flamants roses du Trébon, etc.) et des institutions scientifiques en Camargue. Pour lui, qui relève que "ce projet n'a jamais été officiellement présenté comme prioritaire", les dernières déclarations ministérielles devraient accoucher de "pas grand-chose", d'une décision "mi-figue mi-raisin". Et ainsi offrir aux "anti" l'occasion de ferrailler encore contre "le trajet le plus destructeur en matière d'environnement" en prenant la population à témoin : "les Arlésiens sont bien infichus de savoir ce dont on leur parle", insiste Jean-Luc Moya.

Justement, en préalable à l'enquête publique programmée pour cette année, qui doit par la suite déboucher sur une déclaration d'utilité publique (DUP), les Arlésiens et les Saint-Martinois (les deux communes sont concernées, Ndlr) sont actuellement appelés à s'exprimer dans le cadre de la mise en conformité du document d'urbanisme (MECDU)*. "On s'interroge sur la temporalité de la démarche, en période de vacances de fin d'année", pointe Jean-Luc Moya. "C'est un nouveau maillon dans un processus que nous sommes impatients de voir arriver à son terme, expose pour sa part Odile Crombé. C'est très technocrate, mais nous souhaitons que les gens donnent leur avis. Nous ne sommes pas des activistes, et nous pensons qu'il existe une majorité silencieuse qu'on n'entend moins que les écolos revendicatifs."

Alors, malgré les fréquentes paroles rassurantes de la municipalité, qui partage le même objectif (lire par ailleurs), le Collectif 2028 ne sera pas tranquille. "Tant que la DUP ne sera pas prise, il peut toujours y avoir des soucis, glisse Odile Crombé. C'est une affaire hautement politique…"

La concertation publique préalable à la mise en compatibilité du document d'urbanisme (MECDU) est ouverte jusqu'au 16 janvier.

https://www.ville-arles.fr/mairie/avis-au-public-mairie/annonces-legales-avis/concertation-publique-prealable-a-la-procedure-de-mise-en-compatibilite-du-document-durbanisme-mecdu-de-la-ville-darles-avec-le-projet-de-contournement-autoroutier-darles.php

"Une requalification de la RN 113 la plus ambitieuse pour donner du sens au projet"

"Nous sommes conscients que c'est un projet qu'il faut sans arrêt porter, nous ne devons jamais baisser la garde". Marie-Amélie Ferrand-Coccia n'est pas ignorante de l'air du temps : "On sent que ça se tend au sujet des projets routiers, concède la conseillère municipale en charge des transports, des mobilités et des grandes infrastructures routières. Si on coupe le ruban en 2029, ce sera bien."

Refusant de céder au doute, l'élue met en avant "le travail quasi-quotidien avec les riverains" pour que se concrétise enfin la réalisation du "tronçon manquant entre deux autoroutes existantes sur un axe méditerranéen déjà saturé". "En l'état, avec 80 000 véhicules par jour, le trafic sur la RN 113 est insupportable, développe Marie-Amélie Ferrand-Coccia. L'enjeu de sa requalification, que nous voulons la plus ambitieuse possible pour que le contournement autoroutier ait le plus de sens, c'est l'espace qu'on pourra dédier aux transports collectifs et aux mobilités douces. Pour faire de l'écologie urbaine, on en a absolument besoin". De fait, pour l'élue, si le projet était abandonné, "ce serait une catastrophe pour l'avenir".

 

SOURCE: LAPROVENCE.COM